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Carte blanche

Dernier ajout : 22 janvier 2016.

Rubrique dirigée par Aliette Guibert

Carte blanche.

D’abord, dédicace à l’énigme du livre persistant au grand dam de l’imprimerie technique en voie de disparition, passion sensuelle de l’objet concret, l’exception dans l’ère du numérique à l’aune de la grande distribution de la marchandise. Mais pas seulement le livre, car on parle aussi de la disparition des albums musicaux sur CD et non plus pour une qualité technique du son et une vie prolongée, comme le CD fut réputé succéder au Vinyl, mais a cause du coût de production considéré comme trop élevé par les vecteurs de la musique qui pré-achètent les productions.
Carte blanche pour la libre défense et auto-distribution des éditeurs Indie, contenu et existence, et les créateurs appliqués indépendants, ou résistants.

Carte blanche ambigüe, autant dédiée aux ouvrages transgenres ou trop singuliers qui n’auraient pu être publiés dans une autre version que numérique, face aux formats requis par le nombre identique possible de la grande édition, de sa distribution, et pour ce faire avec succès : de sa communication... quant à eux toujours à l’oeuvre de la disparition des forêts, des énergies fossiles, et de l’abus de pouvoir sous la Presse media :)


Cette proposition thématique prend en compte les questions suivantes de l’environnement de l’édition :

Le système du téléchargement commercial est ce qui rapporte le plus aux Majors vectoraux et financiers qui succèdent au capitalisme de la production, pour un coût de production réduit à lui-même, et de distribution minimale, puisqu’il n’y a ni recours à une matière brute, ni au conditionnement physique du produit sensible (disparition de toute une chaîne artistique et technique des économies afférentes, par exemple pour les albums sur CD, qui référaient à la tradition du livre). Un sigle, un logo, une marque en post production, incarnent le nouveau commerce en ligne d’index des titres proposés par les banques de données. C’est le produit le plus abstrait qu’on ait pu imaginer et le plus rentable quel que soit le producteur qui l’utilise, et réputé respecter la trace écologique. De plus, il permet une diversification en nombre par l’extension de produits multiples, plutôt que des stocks de produits identiques (sinon les lignes d’écriture codées des mots clés), puisqu’ils sont distribués à l’unité...

Il est aussi celui qui coûte le moins aux petits éditeurs et à l’auto-édition et leur permet une distribution directe sur le web. Ce qui ne constituera pourtant pas un gain systématique, sous toutes les conditions du consommateur qui l’utilise. Par exemple, pour un chercheur sans statut particulier, imaginons la superposition du coût d’un téléchargement d’un livre et celle de l’auto-impression en papier et en encre, pour le réaliser ultérieurement en document de travail, libre de toute prothèse intermédiaire de lecture.

Dans ces conditions, CARTE BLANCHE défendra d’abord des objets en voie de disparition — inclus l’importance symbolique des auteurs dans la communauté. Raréfaction qui ouvre un champ double :

— d’un côté une méta valeur d’art actuel, populaire, bien que contradictoirement liée à la rareté qui se situe au-delà des messages contenus... valeur de raréfaction non du fait de l’appropriation, mais de l’évolution des techniques et de la distribution, et de l’usure des objets concrets existants ; ce qui instruit un paradoxe, sans discontinuer de présenter une valeur d’usage des informations contenues dans ces supports, celui de la part maudite de l’archive aux frais d’un don supplémentaire de l’archiviste, ou de l’éditeur qui persiste contre la règle — feed back de l’appropriation et de la décision exécutive autonome vers l’intérêt commun, pour agir l’hétéronomie du monde.

— d’un autre côté, la valeur de classe traditionnelle de l’art (qui confère à la marchandise absolue sans rapport entre la valeur d’usage et la valeur d’échange), des beaux ouvrages ou des revues cultes du marché de l’art des galeries, valeur liée à l’accumulation centrée de l’appropriation.

Carte blanche, non pas à la propriété du collectionneur, mais recours du collectionneur — y compris pour les nouveautés, qu’il s’agisse d’objets non diffusés ou très diffusés, tous media confondus.

Avec ce dernier paradoxe du moment obligé du dialogue entre technique et technologie numérique, dans l’histoire de la communication des savoirs, des arts et lettres ou de la musique : carte blanche dédiée aux publications si singulières qu’elles n’aient pu être prises en compte par la grande édition, de sorte qu’elles n’auraient pu exister à notre vue ou à notre entendement, sans l’édition numérique.

Modifiée le 24 novembre, 2009.

Aliette G. Certhoux
Directrice de Collection

P. S. Le survol du logo de la rubrique découvre la citation d’une toile de René Magritte (1898-1967), Carte Blanche, peinte en 1965. Pour la découvrir en grand format voir au lien source :
http://www.practicalpainting.com/Articles/Surrealism/Rene_Magritte_Carte_Blanche.htm
(Image protégée)

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