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La comtesse / sur une photographie de Christine Bergougnous 

lundi 14 février 2011, par Christine Bergougnous, Thomas Vinau

C’est là-bas que poussent les meilleurs bolets. Je ne suis pas un voleur, vous savez. Je vais là où ça pousse. Avant, la vieille comtesse nous laissait cueillir sur ses terres. On glanait et elle tolérait même deux ou trois collets. Ça régule les populations, vous savez. C’est bon pour le bois et ce qui vit dedans, sinon, il n’y aurait que des rats et des ronces. Mais depuis l’agence, on est comme des voleurs, alors que je suis né ici moi monsieur. Toutes les crèches de l’an neuf je les ai faites avec la mousse de ce gros chêne à l’entrée du domaine. Et mes enfants tout pareils. La vieille comtesse, elle savait bien que c’est nous qui faisons vivre la terre. Elle nous respectait, elle. Et pourtant je peux vous dire qu’il y en avait du gratin à sa table. Depuis que c’est l’agence, on est comme des nuisibles. Un peu plus et ils appellent le taupier pour poser des pièges contre nous. Non mais franchement ! Ils ne viennent jamais ici, vous savez. L’été parfois pendant un mois, jamais les mêmes. Mais la comtesse, elle n’est pas loin, je peux vous le dire. Elle laissera pas faire n’importe quoi. C’est moi qui taille alors je connais. Je viens ici tous les jours pour le chien. C’est lui qui l’a repérée. Après le gros saule pleureur là-bas, près de l’entrée. Depuis je la vois presque à chaque fois. C’est pas d’ici une bête comme ça. Et puis vous avez vu comment elle se déplace ? Vous avez vu la grâce. Non ça, à tous les coups c’est la comtesse, je peux vous le dire. Elle laissera pas faire n’importe quoi.

P.-S.

J’ai trouvé Arthur un jour de grande solitude :

D’habitude vous ne voyez les yeux des renards que la nuit lorsqu’ils traversent les routes, ou aussi très facilement tôt le matin si par chance vous marchez jusqu’au lac. Là, toute la famille de renards joue au bord de l’eau.

En ce qui concerne Arthur, les choses sont différentes. Ou comment d’une histoire triste vous arrivez au temps du rêve.

Vous savez certainement que les renards sont considérés comme nuisibles, ici en France, probablement parce qu’ils sont connus pour leur avidité envers les poules. C’est la raison pour laquelle la plupart des fermiers français tuent souvent des renards. Ils sont également susceptibles de disparaître d’autres régions du monde.

Arthur est l’un de ces renards. Peut-être a-t-il été tué par un fermier, ou heurté par une voiture, et après empaillé et vendu à quelqu’un. Les chasseurs aiment les animaux empaillés…

J’ai trouvé Arthur chez un antiquaire. Il attendait depuis longtemps, peut-être deux ou trois ans. Je n’ai pas pu résister et j’ai décidé que je pourrais lui proposer une nouvelle vie, plus joyeuse, libre à nouveau, et respectable.

C’est ainsi que l’histoire a commencé. Nous étions tous les deux très seuls. Vous savez que la plupart des gens ont un animal domestique ! Arthur n’est pas devenu un animal domestique, mais simplement un HEROS ! Et cette histoire est vraie.

L’âme ne disparaît jamais, c’est ce qu’une partie des êtres humains croit. C’est pourquoi Arthur est devenu mon partenaire, nos âmes nous parlant l’une à l’autre, en devenant des pélerins sur la Terre, regardant la nature de nouveau, et puis flânant dans les rues de Londres, lui voyageant partout avec moi. C’est le début d’une grande histoire qui nous rappelle que les renards ont été les héros de plusieurs contes partout dans le monde, il y a longtemps.

En Amérique, les indiens croient que les renards deviennent invisibles et il est raconté qu’ils peuvent penser et agir si vite qu’ils sont devenus les symboles de l’intelligence.

Par exemple aussi, si vous allez au Japon, vous trouverez des sculptures de renards à l’entrée des temples : il est dit que la déesse du riz, Inari, avait un messager appelé Kitsune et que ce messager était un renard. On racontait aussi que le renard avait une force magique et qu’il pouvait apporter des messages aux gens. Mais certains renards pouvaient être de vilains messagers, cela dépend des histoires que vous lirez.

Si vous allez en Afrique, vous entendrez parler des renards dans les villages dogons, qui viennent chaque nuit déposer sur le sable des messages. Le matin, les vieux sorciers du village peuvent décrypter ces messages.

Si vous lisez les fameuses fables de Jean de la Fontaine vous en apprendrez énormément sur le comportement et la ruse des renards. Ils se débrouillaient toujours pour obtenir ce qu’ils voulaient, en racontant des histoires à tout le monde !

Et si vous lisez la belle histoie du PETIT PRINCE d’Antoine de Saint Exupéry, vous apprendrez les mots d’amour prononcés par le renard, qui disait qu’on ne voit bien qu’avec le cœur.

Et en ce qui concerne la Chine ? J’ai lu que les renards protégeaient les femmes ! Dans la mythologie chinoise (probablement de LIAO ZHAI) le renard est décrit comme un animal sage, ce que je crois vraiment, et j’ai même appris qu’un renard vivait dans les montagnes, méditant pendant des siècles, avait reçu un pouvoir magique à force de vivre seul dans un endroit aussi isolé. Cependant dans certaines légendes le renard est considéré comme l’âme du diable. Il apparaît la plupart du temps sous la forme d’une femme séduisant les homme et leur prenant tant d’énergie que ces hommes mouraient. De plus, les vieilles croyances chinoises auraient démontré que les renards avaient de tels liens avec l’être humain, qu’on disait d’eux posséder une âme dominante, appelé « ling », qui les rendait encore plus subtils que les autres animaux, ce que je crois aussi. Ils possédaient aussi le pouvoir de la lune par exemple, et pouvaient offrir leurs prières à la lune. Ils apparaissaient aussi sous la forme d’humains, et si vous pratiquez le Qi Qong vous trouverez effectivement des exercices du renard priant à la lune, ce que j’ai récemment lu.

C’est comme çelà qu’on arrive à la conclusion que les hommes et les animaux ont des liens si étroits qu’ils ne peuvent vivre les uns sans les autres. Nous sommes tous des créatures vivantes qui devraient peut-être faire plus attention à cet aspect, même si l’évolution de la vie rend les choses de plus en plus difficiles.

En ce qui me concerne, en tant que photographe, vivant dans un endroit encore sauvage du sud de la France, je continuerai à voyager avec Arthur, et à regarder comment les choses changent autour de moi. C’est toujours intéressant d’observer de la façon la plus simple comment nous vivons, et comment les paysages sont transformés par l’homme, et par une population grandissante, et comment et pourquoi les villes sont de plus en plus importantes pour l’intérêt des hommes en comparaison avec la campagne, et surtout, je continuerai à contempler le monde comme une illusion, même si nous devions croire, que tout ceci n’est qu’une illusion aussi.

D’un lieu à l’autre dans toutes ses différences le renard Arthur est certainement le contemplateur des choses, mais il rencontre aussi les hommes. C’est ainsi que nous arrivons à un nouveau mode d’observation : les humains ont besoin des animaux pour vivre de façon plus équilibrée ! Excepté bien sûr le fait que nous avons besoin d’eux pour nous nourrir, nous en avons définitivement besoin en tant qu’animaux de compagnie, d’amis, de membres de nos familles. Les animaux sont le vecteur de rencontre des humains. Les animaux, en tant que compagnie, sont les centres d’intérêt des enfants, des adolescents, des adultes et des personnes âgées, des pauvres et des riches, de nous tous. Il s’agit soit de poissons, d’oiseaux, de chats, de chiens, de souris, de vaches, de pandas, ou tout simplement d’un renard.

Oui, c’est ainsi qu’Arthur est revenu à la vie : il permet aux gens de se rencontrer à nouveau, différemment, facilement, et avec beaucoup d’amour et de tendresse… Savez-vous que beaucoup d’Européens se sentent très seuls ? Enfin, c’est ce qu’ils disent ici…. Et nous deux, Arthur et moi, aimerions voyager jusqu’en Chine, bien sûr.

J’espère que vous aimerez la quête de la lumière d’Arthur, le symbole de la beauté et de l’harmonie qu’il représente.

Christine Bergougnous

1 Message

  • La comtesse / sur une photographie de Christine Bergougnous 14 février 2011 21:21, par valérie

    J’ai aimé ces deux textes très complémentaires même si bien différents

    Après le loup, le blaireau, le renard et la belette...

    Un jour, qui sait ? le chat, le chien. Nous les mangerons peut-être. Nous mangeons bien du lapin, de la poule... Ils sont mangés ailleurs mais,

    nous les tirerons à bout portant, qui sait ? qui sait de quoi sera fait demain si nous n’y prenons garde ?

    Une telle haine sur le chat, le renard, l’ours...que reflète t’-elle sinon nos ignorances ?

    le renard, l’étranger, le rom...Tous ce qui est différent deviendra-t’il nuisible ?

    ça fait peur quand même tous ces reculs dans l’ignorance ! je ne sais pas grand-chose mais je sais que la haine rode

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