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La mort, les sorciers, le paradis.... DIEU 

jeudi 11 août 2011, par Robin Hunzinger

Drôle de nuit ce soir à parler avec mon fils de la mort.

Pour lui, la mort c’est le sang : " Et puis après papa il se passe quoi ? Moi je ne veux pas aller au paradis."

Comment expliquer à un enfant de cinq ans la mort, notre fin, nos rêves et nos croyances sur l’après ?

Agnostique, je n’ai pas de réponse toute faite. Je lui parle de Jésus comme d’un prophète, mais je vois que je n’arrive pas à répondre à ses premières questions sur le sens de sa vie. Je suis même étonné qu’il me pose déjà ces questions-là : "Quand Mamie et Grand-père vont mourir ?"

Je me suis souvent réveillé la nuit avec ce type de question. Souvent en sueur avec cette évidence instantanée de n’être rien, que tout cela n’a aucun sens.

Alors que lui dire ? Qu’une force divine peut exister, et peut ne pas exister ?

Comment expliquer le bien fonder de la théorie ?

Ici tout le monde parle de dieu, de croyances, de sorcellerie. On utilise avec une facilité et une mauvaise foi inconsciente le mot "Dieu". Dans chaque village on compte des dizaines d’églises différentes.

J’ai du mal avec le créationnisme porté par ses mouvements évangéliques américains et qui est en totale opposition avec la conception philosophique de l’agnosticisme. Le créationnisme, ici, essaie de donner une valeur scientifique à des affirmations purement dogmatiques (comme la Création du monde en une semaine), relevant de la foi et absolument pas d’une démarche rationnelle et empirique, comme en relève la position agnostique. Mais je parle peu de ce sujet. J’explique juste que je suis issu d’une famille protestante calviniste et que je ne crois pas aux faux prophètes, aux donations...

Du coup, je me montre d’autant plus critique que le créationnisme m’épuise.

Alors, je prends des notes. Je réfléchis à un documentaire pour les enfants avec ces incroyables questions d’enfants. Puis je reprends un autre fil. Je cherche.

Je photographie une quinzaine d’églises et leurs noms évocateurs. Certaines ont même des slogans.

A force de jouer avec cela, je ressens un profond sentiment iconoclaste. Ne plus filmer ni ne prendre de photos de tout ce qui se rapporte à Dieu.

Justement, au retour de Sakassou, la douane ivoirienne m’a arrêté. Ils ont inspecté mes valises et y ont trouvé deux petites statues baoulés. Je les avais enveloppées dans du plastique.

Le douanier n’a pas voulu ouvrir les sacs. Il a juste touché avec ses mains les objets et m’a demandé d’où venaient ces statues et masques sacrés. J’ai répondu : Bouaké. Pas satistfait, et suant, il m’a dit qu’il allait prévenir les "Eaux et forêts".

Aya et son frère sont descendus du bus. Longs palabres devant les coffres latéraux sous l’oeil des passagers et des badeaux.

Finalement, il nous laisse passer. Nous venons de franchir le corridor de Tiebissou. Quelques heures plus tard, de nouveaux douaniers nous reposeront les mêmes questions au corridor de Yamassoukro jusqu’à ce qu’une pluie battante fasse repartir le bus.

Pendant ce temps-là, des femmes et des enfants nous proposaient, à même la route du maïs, des escargots, des crevettes, des oeufs.... J’ai fini par acheter un bel épis de maïs braisé, et pendant que les douaniers ouvraient toutes mes valises, je l’ai mangé avec délectation.

Ce soir, j’entends encore ces voix, ces odeurs, ces couleurs.

Sakassou-Tiebissou-Yamassoukro
Sakassou-Tiebissou-Yamassoukro
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