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En Garde à Vue...

lundi 1er mars 2010 (Date de rédaction antérieure : 28 mars 2024).

Sur France Inter le vendredi 26 février 2010 a eu lieu une émission citoyenne de la plus haute importance. Elle demeure accessible en ligne.

Deux livres et deux sites sont à la source de l’émission :

Le livre noir de la garde à vue :
parfait manuel de savoir-vivre en commissariat


Patrick Klugman, éd. Novaplanet, 2010, Paris.

Le site de Patrick Klugman, avocat :
http://mry.blogs.com/garde_a_vue/

La page d’information dans Novaplanet

Gardés à vue


Matthieu Aron,
coll. Documents, éd. Les arènes,
2010, Paris.


Aujourd’hui 1er mars 2010 a lieu une nouvelle tentative du barreau de Paris pour tenter d’ouvrir le mur de la garde à vue... Comparution immédiate des avocats devant la 23è chambre du Tribunal correctionnel ; ils cherchent à obtenir la présence de l’avocat tout au long de la Garde à vue, conformément à l’ordre constitutionnel : qu’en sera-t’il ? (Voir l’article dans Le Monde) *

Alertée par mon voisinage je suis un des témoins indirects de ce qui est survenu dans la vie de mon boucher (le boucher auvergnat de mon quartier)...
Sa boutique était restée close sans affichage pendant deux jours ouvrés il y a une huitaine de jours, au terme desquels il réapparut soudain derrière son présentoir, l’air hébété, édifiant ses clients de l’étrange accident qui lui était arrivé.
Suite à une erreur policière ** il venait d’être arrêté dans la rue sans raison et mis en garde à vue violemment, sans dormir pendant 48 heures, aux normes torrides des suspects informés par le Pentagone vus par l’OTAN revus par la police réformée d’un pays de pointe, soumis et zélé comme le nôtre...
Après qu’il fut maltraité en toute impunité et laissé nu, en slip, sans explication, dans un froid recoin du pays qui se prétend représentatif des droits de l’homme aux yeux des anciennes colonies, et lui laissant supposer que cela pouvait durer davantage, soudain on lui rendit ses affaires en le priant de quitter le commissariat au plus vite ; comme il demandait pourquoi il avait été arrêté on lui répondit que c’était une erreur mais aucune information ne lui fut donnée davantage, ni aucune excuse... Je ne sais pas si l’assurance professionnelle fonctionne dans le cas de deux jours de fermeture d’un commerce pendant la semaine ouvrable, en tous cas le boucher qui ne roule pas sur l’or même s’il est un bon boucher doit suivre une psychothérapie de soutien pour résorber l’état de stress dont il n’est toujours pas remis.

Cette histoire m’a effrayée. J’ai plus de 60 ans, et parfois dans la rue quand la police maltraite quelqu’un, je m’exprime.. cela est un facteur de risque. Alors je me suis imaginée dans ma vieille nudité parmi d’autres femmes déshabillées, encloses dans une cage de deux mètres sur deux aux murs maculés de saletés organiques et devant peut-être en ajouter malgré nous, sous les yeux de policiers aimables comme des militaires ottomans dans Laurence d’Arabie (s’il y eut des ottomanes dans l’armée).. et je me suis demandé franchement, blague à part, si mon coeur fatigué résisterait à l’humiliation corporelle et à l’inconfort répressif — disons à la honte et au froid, aux grossièretés, à la bêtise, d’une police pré-fasciste (déjà néo-fasciste) par l’organisation et l’autorisation supérieures, puis j’ai pensé à mes petits-enfants, tout ce qui pourrait leur arriver dans cette sorte d’horreur du malentendu violent établi comme règle. Et j’ai eu très envie de quitter ce pays où il n’est pas de nouveau préfet qui ne soit commissaire de police, où la justice est réduite au parquet et aux lois d’exceptions, valant comme ordinaire, sans retour — puisqu’aucun parti d’opposition ne se risque à inscrire dans son programme électoral le recouvrement des libertés...

Travail Patrie (inutile de se lever tôt puisqu’il n’y a rien à faire sauf la guerre). Plus de contrôle des élus, les cooptés décident, les patrons des banques se confortent — aucun n’est jamais condamné à quoique ce soit après les pires scandales, ils ne seraient que des laquais, ce serait donc injuste ?.. Mais qui a la tête coupée aujourd’hui ? Le populo et surtout ne pas oublier la classe moyenne. Partir avec ma famille, mes enfants, mes petits enfants, un petit bout de chemin de bonheur est-il possible encore ? Peut-être...

Tout est devenu hostile ici : la police, le coût de vie, les taxes, les mauvais services, la surimposition, la peur du lendemain et le sentiment de précarité biologique, la pression des maladies environnantes, la vitesse des voitures dans la rue, le flot des paperasseries aux délais menaçants, l’encerclement bureaucratique, les coups d’épaules aveugles au passage sur les trottoirs, au point qu’on étouffe, qu’on s’inhibe — même ceux qui gagnent encore leur vie —. On craint de se préparer des maladies terminales, bien sûr on se trouve dans un des pays aux taux d’accroissement annuel des cancers le plus élevé du monde, et aussi l’un des pays au taux de suicide de la jeunesse le plus élevé d’Europe — sinon le plus élevé. Il faut le savoir. Nous qui nous payons le luxe d’empêcher l’accès des immigrés, nous qui chaque jour accroissons au dehors comme au dedans le nombre de ceux qui ont faim... Hostiles dehors et dedans. Hostiles pour les autres et pour soi-même. Même l’amour de soi ne suffit plus à retourner le monde. Non pas aller très loin mais de l’autre côté d’une frontière — disons dans un pays frontalier ou vers le nord de l’Europe, des pays il y en a qui demeurent accueillants. Partir (dit-il).

À savoir, tout ce que vous apprendra y compris de plus joyeux peut-être, l’émission de France Inter, car bien sûr mon boucher n’est pas le seul à avoir subi ce genre d’erreur, sinon il n’existerait nul ouvrage ni émission. D’où l’alerte et les conseils pour chacun : chacun étant susceptible d’être victime du même imprévu mais si possible ne devant pas mourir sous le choc de la disconvenue (il y a aussi quelques morts violentes, par anoxie lors d’arrestations musclées des protestataires, tel ce vieil algérien en voyage, dans la banlieue parisienne, il y a un an ou deux, par exemple), avant de sortir (ou dans les jours qui suivent). Et jamais d’avocat dans les gardes à vue. C’est interdit, avant que la police n’ait fait son ouvrage. Heureusement, il y a maintenant le médecin, mais est-il libre de penser à propos de ce qu’il constate et de le dire ?

Pour suivre la trace d’acier du grand oeuvre de la Garde des sceaux, ancienne ministre de la Défense puis de l’Intérieur, et de ses consultants réduits à un principal vulgaire, grand éradicateur de vie (car la vie c’est obligatoirement l’imprévu, la vie perturbe les plans de règne), celui mortifère qui se dit abusivement mais en tout pouvoir chercheur, gardien hippo des archives judiciaires soudain dérobées au public, dans un magnifique espace à l’École militaire pour rhino, où il reçoit la ministre des affaires étrangères des États-Unis, qui vient donner ses ordres pour la sécurité européenne... Ce cuistre réhaussé se prend pour Edgar Hoover. A part Tarnac — beaucoup, beaucoup plus long que la garde à vue —, voici un autre résultat, égalitaire, car il concerne le plus grand nombre, ils ne font pas le tout, on reste à ignorer le pire.

Qui nous débarrassera de ces gens là ? De qui dépendent-ils ? Quels pactes secrets les autorisent contre les autres ? Hoover a traversé combien de présidences aux Etats-Unis ? et le clan des Bush ? ça d’un côté et les grands marchés de l’autre... et la fissuration du code symbolique des lois pour le bien être en société, enfin.

La police citoyenne : on la paye elle coûte très cher au populo prélevé, elle lui doit le respect. Comme le gouvernement, il coûte très cher au populo prélevé : il nous doit le respect. De même, le président. Et pour ne pas ajouter qu’un député à 25 000 euros par mois (tout compris ?) c’est je crois mieux qu’un métier pour gagner sa vie, alors forcément ils s’accrochent, au niveau le plus bas des requêtes, pour durer... En pleine crise c’est scandaleux. Et le parlement européen et les experts, les commissionnaires etc... je ne vous dis pas. Pendant ce temps nous on s’épuise et on claque les dents après le passage du fisc et de la TVA ou des services devenus privés, et pour les plus pauvres on claque sur le champ. C’est absolument inéthique, il n’y a plus de politique mais du clientélisme lucratif.

Alors oui sur la protestation relative à la garde à vue c’est un test : on va voir.

Dans l’émission de France Inter il s’agit de témoignages directs.

A.G-C.

* Au premier jour d’entrée en vigueur d’une réforme permettant aux justiciables de saisir directement le Conseil constitutionnel, le tribunal correctionnel de Paris a décidé, lundi 1er mars, de transmettre un dossier à la Cour de cassation, afin de déterminer si la garde à vue était conforme à la Constitution. Extrait du dernier article paru dans Le Monde du 1er mars 2010... Affaire à suivre.

** Ces erreurs sont si fréquentes qu’on en viendrait à se demander si elles ne sont pas délibérées, pour accroître la peur, pour résigner à la soumission, faire oublier qu’il exista un choix.


Dans la série hebdomadaire Nous autres, le vendredi de 20h 10 à 21h :

logo_france_inter

En garde à vue....

La page de l’émission dans le site de France Inter :
http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/nousautres/index.php?id=88774

(accessible en Real Player pendant une semaine puis disponible en archives pendant 120 jours) :
http://www.tv-radio.com/ondemand/france_inter/AUTRES/AUTRES20100226.ram

900 000.

En 2008, 900 000 personnes ont été mises en garde à vue. Même le premier ministre Brice Hortefeux avoue en privé qu’il est tombé de sa chaise quand il a découvert ces chiffres.

900 000.

Comment en est-on arrivé là ?

La garde à vue est devenue un problème politique majeur.

Les avocats contestent devant les tribunaux la légalité de la procédure contraire à la jurisprudence de la cour européenne des droits de l’homme.

Les policiers, eux, s’indignent de la campagne de désinformation, de la critique surmédiatisée, ils se disent pris entre le marteau et l’enclume, soumis à la culture du chiffre imposée par le ministère de l’intérieur.

La garde à vue est devenue un indicateur essentiel de l’activité des services de police.

Le parquet, lui, censé pouvoir contrôler le bien fondé de la garde à vue, est en réalité tout à fait dépassé, incapable de faire face à ces 900 000 privations de liberté.

Toutes les parties s’accordent pour dire qu’il y a urgence, qu’il faut changer la loi,

mais en attendant les arrestations arbitraires continuent, et nous connaissons tous dans notre entourage quelqu’un qui a été placé en garde à vue et qui en garde un souvenir traumatisant.

La garde à vue est devenue une mesure banale, un outil de gestion sécuritaire.

Ce soir, vous allez entendre plusieurs témoignages, des histoires parfois incroyables, ubuesques, des histoires folles mais toutes vraies. Une punkette, un prof de philo, un journaliste, un retraité, un syndicaliste, tous ont été placés en garde à vue alors qu’ils n’avaient commis aucune infraction.

C’est un reportage de Joseph Beauregard.

Le générique
Brazilian Sun de CocoRosie
album : Noah’s Ark chez Touch and go Records
programmation musicale

* > Mitsoobishy Jackson :
album : The confusion of A.J Schicksal 1927-1973
(62 TV Records)

(instrus)
* > Soap&skin : Mr .Gaunt PT1000
album : Lovetune for vacuum
(Pias)
* > Bruno Chabert :
album : The sound the space
(Tabata Music)

(instrus)
* > Kat Onoma : Que sera votre vie
album : Kat Onoma
(EMI)


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